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Broda fait son cinéma – Les Passeurs

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Broda fait son cinéma - Les Passeurs
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Après une cérémonie d’ouverture animée par un Edouard Baer inspiré, – peut-être par la présence de la divine Anna Karina et les extraits de Pierrot le fouet qui faisaient le lien avec la désormais fameuse affiche de cette 71eédition – c’est le délégué général Thierry Frémaux, pour sa part plus tendu, qui a présenté le Jury et sa présidente Cate Blanchett. L’actrice a eu droit à la présentation de sa bande démo (impressionnante !). En fin de cérémonie, nous avons tous eu la surprise de voir débarquer Martin Scorsese qui a, conjointement avec la Présidente, déclaré « le 71eFestival International du Film de Cannes ouvert ».

Le cinéaste américain Martin Scorsese et l'actrice australienne Cate Blanchett, présidente du jury, ont ouvert le 8 mai 2018 le 71e Festival de Cannes Photo Alberto PIZZOLI. AFP
Le cinéaste américain Martin Scorsese et l’actrice australienne Cate Blanchett, présidente du jury, ont ouvert le 8 mai 2018 le 71e Festival de Cannes Photo Alberto PIZZOLI. AFP

Ce n’est pas une si grande surprise que Scorsese soit à Cannes. Tout à l’heure, à 19h30, il recevra le Carrosse d’Or…
Le Carrosse d’Or est avant tout un film de Jean Renoir réalisé en 1952, qui rend hommage à la Commedia Dell’Arte et dans lequel apparaît la divine Anna Magnani… Mais c’est aussi une récompense créée en 2002 par la Société des Réalisateurs de Films pour récompenser un réalisateur qui compte, ou qui a compté dans l’histoire du cinéma et donc au Festival de Cannes. Les lauréats de ce prix prouvent son importance : Clint Eastwood en 2003, Jim Jarmusch en 2008, Agnès Varda en 2010 ou encore Werner Herzog l’année dernière.

Martin Scorsese est une figure incontournable, comme nous le savons tous, du cinéma mondial depuis les années 70. Sa Palme d’Or au Festival de Cannes 1976, l’y a d’ailleurs aidé ! Cette année-là, il était en compétition officielle et non à la Quinzaine…

Robert De Niro et Martin Scorsese sur le tournage de
Robert De Niro et Martin Scorsese sur le tournage de « Goodfellas » (« Les Affranchis »)

Mais si Martin Scorsese est fêté dans cette fameuse Quinzaine, c’est aussi parce que c’est un cinéphile notoire : son amour pour le cinéma est aussi très célèbre. Outre ses deux documentaires magnifiques, l’un sur l’histoire du cinéma américain en 1995 (A Personal Journey with Martin Scorsese Through American Movies), l’autre sur celle du cinéma italien en 1999 (My Voyage to Italy), c’est une animateur, un passeur, comme disait le regretté Serge Daney, quelqu’un qui veut transmettre l’amour des vieux ou anciens films. Sa passion pour The Red Shoes du fantastique duo Michael Powell et Emeric Pressburger, ou encore pour The Searchers du majestueux John Ford, pour ne citer que deux exemples, font de lui un incontournable transmetteur de l’amour du cinéma.

Mais si Scorsese est un passeur, je souhaite ici rendre hommage à un autre passeur majeur (parler des films, mettre la lumière sur des cinéastes moins connus, découvrir de nouveaux horizons cinématographiques…) qui est décédé le week-end dernier, à l’aube de ce 71Festival. C’était l’un des plus célèbres inconnus de la profession cinématographique : le magnifique Pierre Rissient.

Pierre Rissient. Photo : Léa Crespi pour Télérama
Pierre Rissient. Photo : Léa Crespi pour Télérama

Pierre Rissient était un cinéphile pointu et bienveillant à la fois, faisant parti des mac-mahoniens, groupe de cinéphiles fanatiques du cinéma américains, qui fréquentaient le cinéma le Mac Mahon (dont Pierre Rissient assurait la programmation). En désaccord cinéphilique avec la fameuse politique des auteurs prônées par les très dogmatiques Cahiers du Cinéma, les mac-mahoniens préféraient Raoul Walsh, Otto Preminger, Joseph Losey et Fritz Lang. Alors que les Cahiers du Cinéma étaient plus portés sur John Ford, Howard Hawks, Alfred Hitchcock et Orson Welles. Querelles de clocher, car aujourd’hui, ce sont huit maîtres de l’âge d’or du cinéma américain, point à la ligne !

Pierre Rissient a été assistant réalisateur, entre-autre d’À bout de souffle, du si fameux, sulfureux et subversif Jean-Luc Godard, ou encore de Michel Deville.

Il était aussi le promoteur du cinéma asiatique, dès les années 70 : il s’ouvre et nous ouvre ainsi aux cinémas de Taïwan, Hong Kong, de la Corée du Sud, etc. Et cela bien avant qu’Edward Yang, Hou Hsiao Hsien, John Woo, Tsui Hark ou encore Wong Kar-Wai ne confirment son intuition dans les années 90.

Mais surtout, Rissient a été attaché de presse, notamment du fameux Johnny got his Gun, seul film réalisé par le grand scénariste Dalton Trumbo. Sûrement l’un des films les plus pacifistes et humanistes qui soit, alors que d’autres (JLG pour ne pas le nommer) signent, aujourd’hui même, des pétitions belliqueuses poussant au boycott de certains pays…

J’encourage tout le monde à voir en bonus du DVD de Johnny got his Gun, une interview de ce cher disparu du week-end.

Je vais arrêter là cette déclaration d’amour pour ce passeur d’idées, d’amour (du cinéma) et d’émotions (tout court), bref, des choses qui comptent.

Salut à toi Pierre !

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